"Lors de notre deuxième rencontre, ce fut à nouveau la nuit, plus belle que jamais, rayonnante d'étoiles infinies, illuminant une île déserte, perdue au milieu d'un océan mystérieux, qui abritait un peuple de monstres. Depuis le début, je n'ai jamais compris ce besoin constant qu'il avait d'être plongé dans les ténèbres, même après avoir appris la vérité. Mais si j'étais vraiment honnête envers moi-même, je devais reconnaître que ce n'était pas uniquement sa faute, car comme il me l’avait fait trop souvent remarquer, je n'ai jamais vraiment donné d'importance à ses choix du moment que j'étais pour lui ce qu’il était pour moi. Et au moment même où je l’ai réalisé, mon cœur s'est libéré de ses chaînes et s’harmonisa avec le sien, unis dans la voie lactée. Cette deuxième fois, il fut si tendre, si entier que j'ai senti tout mon être s'embraser comme l'aube naissant, cette aube qu'il avait oubliée depuis si longtemps. Comme l'écoulement du temps, ou la forme de la lumière astrale, notre destin était inéluctable. Et il ne pouvait en être autrement".
Allongée sur un grand rocher ocre, la princesse Ariane regardait avec passion son amant, le seul qu'elle ait jamais aimé. Le simple fait de le sentir, lui apporta une sorte d’ivresse incomparable, et une grande sensation de satisfaction l’envahissant toute entière et dont elle eut la certitude de pouvoir durer pour des siècles.
Seule l'eau opaque et sans fond les entoura et les fit vibrer de ses secousses. La brise froide soufflait doucement et caressait leurs chevelures emmêlées. Peau contre peau et leur chaleur grandissante qui les faisait fondre comme un chaudron solaire, ils unirent leurs corps pour n’en former qu’un seul. L'univers étoilé fut le témoin unique de leur étreinte sublime.
Ne pouvant s’arrêter d’aimer inlassablement son corps délicat, le guerrier commença à souffrir de la lumière qui apparaissait faiblement à l'est. Mais même la douleur qu'il ressentait ne fit que s’ajouter à son plaisir.
Rien ne pouvait les arrêter, alors il sourit à Ariane et embrassa ses lèvres savoureuses avant de se perdre pour la énième fois dans leur parfum d'amour.
Sentant le plaisir infini brûler tout son intérieur et envelopper son esprit pour l’emporter vers un voyage merveilleux, Ariane sentit ses larmes couler pour se sécher au vent. Elle sourit à la source de sa joie.
- La lumière. Mon amour, le soleil se lève. Tu vas brûler, murmura doucement Ariane.
Le souverain caressa doucement la chevelure de feu.
- Je sais, mais tu n'as pas à t'inquiéter, parce que tu m'as déjà blessé plus que la lumière ou tout autre chose ne le fera jamais.
- Je suis désolé, je n'ai jamais voulu ça. En fait, je n'ai jamais rien compris. Pardonne-moi. Je t'aime, c'est tout.
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Tout avait commencé il y a un mois lorsque la princesse Ariane avait décidé d'assister à une soirée particulière organisée par ces gens lointains qu'on appelait des « mystères ».
Le matin de la rencontre fatidique, Ariane avait rendez-vous avec ses deux meilleures amies porteuse de l’invitation tant convoitées et redoutées à la fois.
Elle les attendait, tranquillement installée sur le balcon de son restaurant préféré. Comme elle était une invitée régulière du lieu, pour ne pas dire royale, la propriétaire lui réservait toujours la même table, la plus discrète, d'où l'on avait une vue imprenable sur la ville. Ariane adorait passer son temps libre dans le salon de thé tout en observant les gens dehors se mélanger avec animation, tout en se dirigeant vers leurs propres affaires. Ce jour-là, le temps était particulièrement beau. Le ciel bleu au-dessus d'eux aurait ravi les plus pessimistes, et les arbres plantés le long des trottoirs dont les fleurs s’ouvrant joyeusement au soleil, et les pétales flottant au vent, offraient une rare scène naturel inestimable, et allaient sûrement inspirer plus d’un artiste.
Tout ce qui entourait Ariane représentait la vie. Hélas, pour son malheur, la jeune femme elle-même, était une personne triste qui n’était plus capable de ressentir grand-chose. Elle était devenue vide et glacée.
"Quelle ironie, pensa-t-elle cyniquement, aussi grande que soit la magie, la richesse ou la beauté que l’on pouvait porter en soi, il existait des choses que l’on ne pourrait jamais réaliser. Des choses comme créer des astres, changer les saisons ou encore guérir une âme abîmée comme la sienne. Les choses essentielles".
Quand ses amies arrivèrent, elles firent comme d'habitude une entrée bruyante, et amenèrent avec elles, à défaut de lumière et de compréhension, une merveilleuse diversion à son esprit tourmenté.
- Bonjour Altesse ! Lancèrent-elles joyeusement en guise de salutation, tout en prenant place en dégageant une bouffée de senteur artificielle.
- Bonjour les filles. Répondit l’altesse tendrement ironique. Comme d'habitude, votre entrée a été tout sauf discrète.
- Tu m’étonnes, nous sommes faites pour ca. Répliquèrent-elles, nullement affectées par le sarcasme de leur amie. Et d'ailleurs, tu es arrivée ici avant nous.
- Et on devine aisément à quel genre de stupidité tu as consacrée ton attente. Irrésistiblement déchirée par ces étranges pensées lugubres, morbides qui te dévorent constamment l’esprit. Continuèrent encore les deux arrivantes, impitoyables.
- Très drôle. Répondit la princesse amère, sans pouvoir réfuter ces terribles affirmations. Vous voulez du thé ?
Les deux compères refusèrent doucement avec un reste de mépris, regardant légèrement autour d'eux.
Ariane observait attentivement ses deux plus proches amies. Elles se connaissaient depuis l'enfance. Possédant des racines dans le même lieu privilégié où le prestige et l'argent régissaient comme des maîtres absolus. Elles ont trouvé dans leur amitié un semblant de refuge contre leur quotidien rigoureux.
Une existence étouffante où les artifices, les manières irréprochables et les mensonges mielleux, étaient les barreaux quasi-indestructibles de leurs cages dorées.
Pour leur rendez-vous joyeux, les deux amies portèrent des tenues luxueuses, très élégantes mais un peu trop voyantes pour le goût de la princesse. L'une portait un ensemble rouge vif assorti à des escarpins noir-argent, et des bijoux en or blanc ornaient ses poignets et son coup mince. Ses cheveux grenat avaient été relevés en un chignon sophistiqué qui révèla toute la fraîcheur du maquillage artistique. L'autre pour sa part portait un manteau en vison bleu électrique sur sa robe courte grise et de lourdes boucles d'oreilles en or. Elle avait chaussé ses petits pieds minces de bottes en daim bleu foncé et avait décidé de laisser ses longs cheveux blonds scintillants couler librement sur ses épaules.
- Vous êtes toutes les deux belles aujourd'hui.
- Merci. Un tel compliment de la part d'une beauté telle que toi est une sorte de porte-bonheur, déclarèrent-elles malicieuse Mais comme tu devrais le comprendre, en hommage à notre radiance, nous apprécierions un restaurant plus....
Elles affichaient un profond dégoût sur leur visage tout en désignant d’un geste vague de la main le restaurant habituel de leur amie.
- Branché ? Ariane compléta pour eux ironiquement.
- S'il te plaît, ton Altesse, comprend-nous. Ce restaurant, si vraiment on peut l’appeler ainsi, est charmant. Vraiment.
- Mais ?
- Mais c'est pour les gens ordinaires.
- Charmant !
- Mais regarde-nous, il est évident que nous sommes tout sauf cela, des amateurs de scintillements et d'admirations.
- Je pense que c'est un peu trop pour moi, les filles !
- On doit jouer le jeu Ariane ! Nous avons besoin d'un endroit où les gens du monde sont continuellement présents et peuvent nous fixer. Et en allant à l'encontre de ce fait, tu choisis toujours ce genre d’endroit si morne et délabré. C'est presque aller à penser que tu désires te faire du mal et diminuer notre splendide ego. Pas étonnant que tu sois devenue aussi pâle !
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