Je me réveille avec un puissant mal de tête. J’observe ce qui m’entoure. De toute évidence, ce n’est pas ma chambre. Les souvenirs de la soirée chez les Belcourt me reviennent petit à petit. Je comprends mieux pourquoi je me retrouve dans une pièce peu éclairée face à un homme armé. Adossées aux murs, se trouvent d’autres femmes. J’en compte huit. Je m’approche doucement de l’une d’elle pour lui demander ce qu’elle sait.
-Je ne suis pas sûr, mais je pense que nous sommes enfermées en attendant la fameuse vente aux enchères qui est illégale. Vous voyez ? Celle où ils vendent des œuvres volées, des produits illégaux ou encore des femmes.
Sa voix tremble à chaque mot qu’elle prononce. Je n’ose même pas imaginer depuis combien de temps elle est retenu ici. Et je pense qu’elle-même ne doit pas le savoir. J’hésite à lui poser d’autres questions. Je n’aimerais pas la faire pleurer et que notre gardien s’en prenne à elle. Je vais juste lui demander des choses qui ne devraient pas la mettre mal à l’aise.
-Vous savez combien de temps, j’ai dormi ?
-Vous êtes arrivé après le repas du soir et là, ils vont bientôt nous servir celui du midi donc je dirais entre dix et quinze heures.
-D’accord et vous savez quand ont lieu les enchères ?
Elle secoue la tête pour me faire comprendre que non. Je ne l’embête pas plus et m’assois également contre le mur. Pourquoi M. Navarro et les autres ne sont pas intervenus ? Il me semble pourtant que je ne devais pas rester ici bien longtemps, mais ça fait déjà environ quinze heures. Je me souviens d’un coup que je n’avais pas pu leur faire signe que je partais et donc ils n’ont pas pu nous suivre. Ce qui veut dire que tout notre plan tombe à l’eau et que je n’ai plus qu’à prier pour ne pas être acheté par un mauvais homme. Mais dans ce genre de marché, les bons hommes n’existent pas. Il est plus qu’évident que je vais devenir le nouveau jouet d’un pervers ou d’un obsédé. Ou avec un peu de chance, il me fera seulement faire le ménage m’utilisant comme de la main d’œuvre gratuite. Les deux cas ne me réjouissent pas. Dire que j’aspirais à une certaine liberté il y a quelques jours et qu’à cause de mon trop grand cœur, ou de mon idiotie, je me retrouve piégé entre quatre murs attendant de me retrouver dans le logis d’un maître pire que M. Arlot. Je me promets que si je réussis à me sortir de là, je ne rendrais plus jamais de service à M. Navarro ou n’importe qui d’autre de semblable. Je laisse mes mauvaises pensées sur le chef des Buglosses de côté et réfléchis à un plan B. Je pense être assez maline pour pouvoir me sortir d’ici même si ce ne sera pas chose aisée.
Je suis stoppé dans ma réflexion par un homme barbu entrant dans la pièce et déposant un panier au centre de celle-ci. Notre geôlier referme la porte derrière le barbu qui repart. Avec le peu de lumière qui s’est immiscé par la petite ouverture de la porte, j’ai pu apercevoir le visage déformé du gardien. Il a une cicatrice qui lui traverse la moitié du visage et une marque de brûlure allant de sa gorge jusqu’à sa pommette droite. Il me terrifie encore plus avec cette face de meurtrier. Il ordonne à ma voisine de prendre le panier et de le faire passer dans la rangée. Quand elle arrive à ma hauteur, j’attrape l’un des morceaux de pain restant et croque dedans. Il est rassis et n’a presque pas de goût. D’après ce que j’ai compris, c’est le seul aliment qui va constituer notre pitance de ce midi. Je jette un coup d’œil aux huit autres femmes. Elles mangent leur morceau sans rien dire. Certaines le dévorent goulûment tandis que d’autres le savoure comme si elle dégustait un repas des plus exquis. Je pense que vu leur réaction, tous les repas doivent être constitué de la même façon. Je me promets de les faire sortir au plus vite pour qu’elles puissent se délecter d’un meilleur repas.
***
Je passe mes journées à dormir, manger le pitoyable bout de pain ou la malheureuse pomme donné et réfléchir à un plan de secours. Ce qui est sûr, c'est que je ne peux pas m'enfuir. Il y a toujours un homme armé assis près de la porte. J'ai appris à mes dépens que leur sommeil et des plus légers et qu'il n'était pas possible de s'échapper sans se prendre une correction à coup de gifle. Je dois attendre le jour de la vente, or, je ne sais pas quand elle aura lieu. Elle pourrait très bien commencer demain comme le mois prochain, mais en toute logique elle ne devrait plus tarder. Ils ne vont pas nous retenir ici une éternité.
Ce matin, nous sommes réveillées par le barbu qui apporte les repas. D'habitude, ils nous laissent dormir à notre guise - si on y arrive - mais aujourd'hui il est entré dans la pièce avec un grand sourire et disant qu'il venait annoncer une bonne nouvelle. Si c'en est une bonne pour lui, c'en est forcément une mauvaise pour nous. Sachant toutes pourquoi nous sommes séquestrées ici, nous connaissons d'avance la raison de l'air jovial qu'il affiche.
-Mesdames, j'ai le plaisir de vous annoncer que vous n'allez plus séjourner ici bien longtemps. Vous devriez toutes avoir une nouvelle maison dès ce soir.
Aucune de nous ne se réjouit. Quand il parle de nouvelle maison, il fait allusion à celle de la personne qui nous achètera. Quelques-unes d'entre nous sanglotent silencieusement comprenant ce qui va leur arriver. Et toutes les autres, les plus anciennes, n'ont pas de réaction. Elles regardent dans le vide, les yeux ayant perdu cette petite étincelle qui assure que nous sommes en vie. Celle qui est générée par l'espoir. Mais ces femmes-ci ont compris qu'ils n'y avaient plus d'espoir. Moi-même, je doute de réussir à fuir. Personne n'a jamais réussi à stopper ce complot ou à retrouver les victimes. Alors pourquoi tout basculerait aujourd'hui ?
Pour être sûr de faire un maximum de bénéfice, nous devons toutes prendre un « bain », changer de vêtements, et être un minimum maquillé et coiffé. Il n'y a pas de salle de bain nous nous lavons donc chacune notre tour avec un seau. Les deux obsédés qui sont chargés de nous surveiller pendant la toilette ne se gêne pas pour nous regarder de manière perverse et sans se cacher. Aucune des dames ne souhaite passer en premier. Après tout, nous ne pouvons que nous sentir honteuse de nous laver face à des hommes et la peur de la moquerie et fortement présente. Voulant les rassurer, je passe en première. Je retire ma robe qui, depuis les jours passés ici, est crasseuse et abîmée. Je me mets face aux deux hommes et leur lance un regard noir. Ils n'y prêtent pas attention, trop occupés à reluquer mon corps. Je m'agenouille, dos à eux et commence à me laver. Je fais au plus vite ne souhaitant pas me donner en spectacle trop longtemps. Nos bourreaux lancent des sifflements et des remarques obscènes. Je dois avoir les joues rougies ainsi que des larmes qui menace de couler, mais je fais de mon mieux pour les ignorer. Je vois mes semblables apeurées et leur lance un petit sourire que certaines me rendent.
Quand j'ai fini, on me balance une serviette et on m'emmène dans la pièce d'en face. Je reconnais immédiatement la personne qui m'escorte. Ce beau visage appartient à Frédéric d'Osier qui attendait dans le couloir. J'évite à tout prix de le regarder, espérant qu'il ne m'a pas reconnu bien que ce serait un miracle. Il me tend une robe. Elle est très simple avec des couleurs ternes. Je remarque qu'il y en a plusieurs autres répliques. Toutes leurs marchandises humaines doivent porter la même. Contrairement à ses compères, il ne m'adresse aucun regard. À la place, il s'assoit sur une chaise et ouvre un livre pour s'occuper. Je m'essuie rapidement et enfile la robe. Ensuite, je me retourne vers M. d'Osier et attends qu'il relève la tête de son livre. Ses mèches châtaigne recouvre le haut son visage, de façon à ce que je ne puisse pas voir ses yeux. Après cinq bonnes minutes pendant lesquelles je ne pipe pas mot, il referme le bouquin et montre une chaise sur laquelle m'asseoir. Il sort ensuite des cosmétiques d'un tiroir et se met au travail.
-Sans le maquillage, vous ressemblez beaucoup moins à Mlle. Ranstre. Je ne sais pas qui c'était occupé de vous, mais il a réussi à vous rajeunir au point que j'ai réellement cru avoir une jeune fille d'à peine seize ans en face de moi.
Je déglutis. Pourvu que le fait que je ne sois pas de la haute société ne me fasse pas tuer.
-Ne vous en faites pas les hommes de ce soir ne prêteront pas attention à ce genre de chose. Surtout que la plupart des femmes présentées dans ce genre de soirée sont des prostituées ou de simple domestiques.
Je ne réponds toujours pas. Tout d'abord, ce qu'il a exprimé en premier me dégoûte. Comment oser kidnapper une jeune fille qui n'est pas encore adulte pour ensuite la revendre comme jouet ? Subséquemment, je me sens légèrement soulagé de pouvoir participer à la vente. C'est sûrement ma seule chance de m'enfuir.
-De plus, les femmes de la haute ne sont pas les plus appréciés ici. Elles ne savent rien faire. Si nous voulions à ce point Mlle. Ranstre, c'est parce que beaucoup d'hommes paieraient cher pour l'avoir. Elle est jeune, belle et riche. Ils peuvent soit la revendre à un prix plus élevé, soit demandé une rançon à son père, soit l'utiliser pour leur plaisir.
Je suis écœurée par ce que j'entends. C'est une horreur de se servir d'une demoiselle qui vient de sortir de l'enfance pour assouvir ses plaisirs de prédateur. Je ne peux pas dire que je suis heureuse d'être ici, mais je préfère que ce soit moi à sa place. J'ai plus de chance de m'en sortir qu'elle. À son âge, elle n'aurait pas osé tenter de fuir ou de répondre. Comme beaucoup, la peur l'aurait cloué sur place et l'aurait condamné. Tout en me coiffant, il fait glisser ses doigts le long de ma joue, y récupère quelques mèches et les passe derrière mon oreille avant de faire retomber sa main le long de ma nuque.
-Je suis sûr que vous serez rapidement prise. Vous savez que vous m'avez vraiment plus le soir de notre rencontre ? Et je peux même affirmer que vous me plaisez encore plus maintenant, avec cet air naturel. Je pourrais presque être jaloux de celui qui vous aura. Je devrais peut-être participer aux enchères pour une fois. Qu'en dites-vous ?
-J'en dis que vous êtes aussi répugnant et monstrueux que tous les autres qui traînent dans ce genre d'endroits.
-Vous y allez fort. Je ne pense pas être comme eux, non. J'avoue avoir participé à votre enlèvement, mais je n'ai jamais approuvé ceux qui achetaient des femmes.
-Si vous n'approuvez pas, pourquoi leur servir d'innocentes femmes voire jeunes filles sur un plateau ?
-On me paye vraiment bien et je ne suis qu'un Homme. Quel être humain refuserait une grosse somme d'argent ?
-Quelqu'un avec un minimum d'humanité justement.
-Dans le mot humanité, il y a le mot humain. Or, l'humain est égocentrique, odieux, arrogant et cupide. Donc, par déduction, ne serait-ce pas ça, l'humanité ?
Je n'ai rien à rétorquer face à cette remarque perspicace. Je n'avais jamais vu ce mot de cette façon, mais en y réfléchissant un peu, on ne peut pas lui donner tort. Après m'avoir attaché les cheveux, il me maquille avec délicatesse pour essayer de camoufler les quelques égratignures et bleus que je me suis faits. Sa douceur est surprenante. Il pourrait être plus brutal, mais c'est à peine s'il ose me toucher. On pourrait me comparer à une poupée en porcelaine entre ses mains. Quand je suis apprêté, il me reconduit à mon point de départ et j'attends, debout dos au mur, comme on me l'a demandé, que les autres reviennent.
Le soir doit être arrivé, j'entends des voix et des bruits de pas. Mes jambes commencent à fatiguer. Pour être sûr que nous ne nous salissons pas, ils nous ont ordonnés de rester debout. L'une de nous, une femme d'environ trente ans, a même fait un malaise à cause de la mauvaise alimentation et du manque de sommeil. Si elle n'est toujours pas réveillée d'ici la fin des enchères. Ils la tueront pour ne pas qu'elle gène plus longtemps.
Deux femmes viennent d'être emmenées et sûrement achetées puisqu'elles ne sont pas revenues. Je suis la troisième. C'est à mon tour de passer. Un des hommes qui s'est occupé de nous surveiller pendant notre toilette vient me chercher et me bâillonne. Je n'ai toujours pas de plan stable si ce n'est d'essayer de m'enfuir maintenant ou quand la personne qui m'aura acheté viendra me récupérer. Je préférerais tout de même que ce soit pendant mon transport jusqu'à la salle, car je crains qu'ils ne m'endorment à nouveau une fois mon tour achevé.
Dans le couloir, je commence à me débattre. Je gigote dans tous les sens en donnant des coups au hasard jusqu'à ce qu'un de mes pieds vienne percuter violemment son tibia. Il me lâche sous le choc et j'en profite pour m'enfuir. Je cours dans la direction opposée où il m'emmenait en espérant trouver une sortie. Arrivée au bout du couloir, je regarde l'escalier qui se présente sur ma droite. J'hésite un instant, mais il n'y a pas d'autre choix qui se présente à moi. J'entends les cris de l'homme qui me disent de revenir, mais je l'ignore et commence à grimper. Il est bien plus rapide que moi et entame sa montée peu de temps après. En haut de l'escalier, j'ouvre la trappe qui me sépare de l'extérieur d'un coup. Elle n'était pas fermée. Je cherche du regard une nouvelle porte et aperçois un rideau qui laisse passer un peu de lumière. Je m'approche doucement, craignant de rencontrer une nouvelle personne malsaine. Au moment où j'attrape le rideau du bout des doigts, j'entends un bruit sourd juste derrière moi. Je n'ai même pas le temps de me retourner que l'homme m'attrape brutalement avant de me ligoter les mains dans le dos et de me balancer sur son épaule. Nous redescendons rapidement et cette fois-ci, je ne peux plus rien faire. Il peste contre moi, lançant des insultes. Je continue de gesticuler, mais ça ne sert plus à rien.
Il entre dans une nouvelle pièce et me pose sur le parquet. Je suis sur le point de me relever pour partir en courant, mais je me stoppe immédiatement. Je me tiens sur une estrade entourée d'hommes armés. Devant moi, il y a une trentaine de personnes dont la plupart sont des hommes. Je suis tétanisée et ne peux plus faire le moindre mouvement. J'empêche mes larmes de couler. J'ai bien trop de fierté pour m'effondrer devant tout ce monde. À côté de moi, il y a le barbu vêtu d'un beau costume qui prend la parole.
-Voici enfin notre troisième jeune fille. Elle a un tempérament de feu et ne se laisse pas facilement faire. Elle a environ vingt ans, mais son identité nous est inconnue. Nous commençons les enchères à dix mille neuf cents francs messieurs dames.
Je vois des mains se lever au fur et à mesure augmentant le prix petit à petit. J'ai de plus en plus peur sachant que je ne pourrais plus m'enfuir. Certains me regardent de manière perverse et je sens les larmes remonter. Si c'est l'un d'eux qui prend possession de moi, je sais déjà à quoi je vais servir. Après plusieurs minutes de débat, un homme propose la somme de trente-deux mille quatre cents francs. Plus personne ne lève la main et le barbu est sur le point de clore l'affaire. L'homme ayant proposé ce montant doit avoir la quarantaine et a un sourire abject sur le visage. Du coin de l'œil, j'aperçois M. d'Osier. Il me fixe avec un air neutre, puis, avec un léger sourire, il lève la main.
-Je propose trente-cinq mille francs.
Je ne sais pas s'il m'a dit la vérité quand il m'a avoué ne jamais avoir participé. Je ne sais pas non plus ce qu'il a prévu de faire s'il me gagne. Mais je me sens pratiquement soulagé qu'il soit intervenu. Le combat se fait entre ces deux hommes qui augmentent le prix graduellement. Quand Frédéric d'Osier propose la somme de cinquante mille francs, l'autre homme ne dit plus rien. Je vois ses joues rougir de colère. Je souffle en étant sûr que l'enchère va se finir dès maintenant. M. d'Osier ne me fait pas particulièrement peur, il a su faire preuve d'amabilité avec moi. Je n'oublie pas que c'est à cause de lui que je me retrouve ici, mais une part de moi a envie de croire qu'il y a une chance pour qu'il ne soit pas aussi horrible comme il l'expliquait. Je ne connais pas ses raisons pour avoir participé à un acte aussi cruel et je doute qu'elles justifient tout, mais si la chance est de mon côté et avec quelques négociations, je peux encore sauver mon avenir. Hélas, il y a un nouveau retournement de situation.
-Je propose cent mille francs ! Crie l'homme de la quarantaine à travers la salle.
Je lance un dernier regard en direction de M. d'Osier, mais il ne bouge plus. Ses chiffres dépassent sa limite. Les derniers espoirs que je m'étais faits volent en éclats. Le barbu annonce la fin de mon tour et l'homme au visage brûlé, celui qui nous surveillait la plupart du temps, s'approche de moi pour m'emmener. Prise d'un accès de colère et surtout dans l'appréhension de ce que je vais devenir aux mains de cet homme, je me mets à crier du plus fort que je peux malgré le bâillon qui bloque mes paroles. Je me remue dans tous les sens essayant de lui échapper et affichant mon désaccord. Je ferme les yeux et donne des coups de pieds en l'air, tentant de toucher ma cible, mais je ne la trouve nulle part. Puis une douleur se répand dans tout mon corps en démarrant de mes cotes gauches. J'ouvre les yeux et vois mon bourreau, bâton en mains, m'affliger plusieurs coups. Le barbu lui dit de ne pas trop m'amocher.
En retournant la tête vers les spectateurs, je vois mon acheteur monter sur l'estrade et arracher le bâton des mains du brûlé. Il ne veut sûrement pas qu'on abîme sa nouvelle acquisition. Ou au contraire, il n'a pas peur de me blesser. Je ressens de nouveaux coups s'abattre sur moi comme une pluie violente. Il enchaîne la même action me répétant de rester sage. Plus il me tape et plus la douleur s'accentue. Jusqu'au moment où j'entre voie la porte au fond de la grande salle s'ouvrir et plusieurs hommes armés entrer. Dans le lot, je reconnais M. Navarro et son groupe. J'ai du mal à suivre toute la scène, encore étourdis parce qu'il vient de m'arriver. La plupart des hommes présents se font arrêter. Certaines des personnes venues nous sauver se rendent dans les coulisses pour essayer de rattraper les fuyards et de chercher les autres victimes.
Mon agresseur est encore derrière moi, stupéfait de ce qui est en train de se passer. Charles Mandrin arrive vers l'homme, lui donne un premier coup-de-poing en pleine figure, puis un second dans le ventre. L'homme lâche son arme et le blond lui fait une prise provenant de je ne sais quel art martial avant de le mettre à terre. Son jumeau et M. Morel s'approchent de moi et me demandent si je vais bien. Je leur fais un petit signe de tête pour leur faire comprendre que oui. Ils m'aident à me relever et m'emmènent à l'extérieur. Il fait nuit noire dehors et le vent est frais. J'en profite pour respirer l'air plus ou moins pur de Paris. Je n'espérais plus remettre les pieds librement dehors. J'évacue enfin tout ce que j'ai refoulé ces derniers jours. Ma détresse, ma frustration, ma peur, ma joie. On me fait monter dans un véhicule qui me conduit à l'hôpital pendant qu'un médecin commence déjà à essuyer le sang qui coule de mon nez.
Les infirmières ont fini de mettre les derniers bandages et me font signer un papier avant de me laisser partir. Je ne sais pas où je vais pouvoir aller maintenant. Bien qu’on m’ait proposé de rester ici pour la nuit, je n’en ai pas vraiment envie. À la sortie du bâtiment, se tient Wilfried. Je suis assez surprise de le voir là, mais quand il me demande de le suivre, j’obéis. Il m’ouvre la porte de la voiture. M. Navarro attend patiemment à l’intérieur. Je m’assois à côté de lui et lui demande où on va.
-Au manoir quelle question. Soupire-t-il.
-Je pensais que je pouvais rester seulement jusqu’à la fin de la mission.
-Il s’avère que les autres membres, on réussit à me convaincre de vous laisser rester avec nous encore quelques jours. Et puis je dois bien me faire pardonner.
Je le regarde méfiante ne comprenant pas d’où vient cet excès de gentillesse. Cela ne lui ressemble pas, et même si les autres membres lui ont parlé, il n’en reste pas moins leur patron et c’est lui qui prend toutes les décisions peu importe qu’ils soient d’accord ou non. Quand je m’apprête à le questionner, il me coupe la parole :
-Au pire, vous pourrez toujours être utile comme appât pour une prochaine mission ou plus simplement pour entretenir ma maison.
Je me tourne de l’autre côté pour observer le paysage défiler, vexée. Je le sens sourire de satisfaction derrière mon dos. Il est vraiment insupportable, mais je vais devoir faire avec pendant encore quelque temps.
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