Il inspira profondément en se tenant près du bassin, ses yeux se posant sur la forêt dense qui s’étendait devant lui. La lumière du jour, filtrée par les arbres imposants, créait un contraste troublant avec l’obscurité oppressante qu’il avait laissée derrière lui.
La cascade rugissante derrière lui continuait de remplir l’air de son grondement constant, couvrant presque ses propres respirations lourdes. Pourtant, l’agitation qui bouillonnait dans son esprit surpassait ce bruit ambiant. Il se sentait tiraillé entre la peur, la fatigue et cette énergie nouvelle qui pulsait doucement dans son corps, comme un rythme étranger auquel il devait s’adapter.
Il posa une main tremblante sur sa poitrine, ressentant pour la première fois pleinement la cohabitation de ses deux noyaux de mana. Le premier, son noyau d’origine, émettait une lumière faible mais stable, tandis que le second, plus intense, dégageait une chaleur réconfortante, presque comme la lumière bienveillante du soleil.
— Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? murmura-t-il en regardant son reflet flou dans l’eau.
Cette question resta sans réponse. Son regard dériva vers la forêt, et ses pensées dérivèrent vers ses souvenirs d’académie. Il revit ces heures interminables passées dans des salles mal éclairées, écoutant d’une oreille distraite les leçons de son professeur, Taphrus.
— « Aelris ! »
Ryven revécut le moment où son nom avait été crié à travers la classe. Il se souvenait encore du ton autoritaire de Taphrus et des rires étouffés de ses camarades.
— « Vous qui semblez ailleurs, peut-être pourriez-vous expliquer à la classe la différence entre un singe capé et un sanglier sanguinaire ? »
Il se revit, cherchant ses mots, balbutiant quelque chose d’inintelligible sous les moqueries des autres élèves. Taphrus, impassible, avait tapé sa craie sur le tableau.
— « Les singes capés sont des créatures opportunistes, territoriales et agiles. Mais les sangliers sanguinaires ? Ils ne reculent jamais. Leur férocité dépasse tout ce que vous pourriez imaginer. »
Ces paroles résonnaient maintenant comme une mise en garde.
Ryven fronça les sourcils, resserrant son sac sur son épaule.
— Les singes sont déjà là… Mais si les sangliers sont également dans ce portail, ça complique tout.
Son regard se tourna vers une colline escarpée non loin. De là-haut, il pourrait observer les environs et peut-être confirmer ses soupçons.
— Une chose à la fois, souffla-t-il, serrant les poings.
Il prit une profonde inspiration et commença à avancer, chaque pas résonnant dans l’écho de la cascade derrière lui.
La montée vers le sommet de la colline ressemblait à un défi interminable. Chaque pas que Ryven faisait sur le sol rocailleux demandait une attention presque douloureuse. Les rochers glissaient sous ses pieds, et les racines noueuses semblaient vouloir l’attraper à chaque instant.
Le soleil, toujours haut dans le ciel, inondait la colline d’une lumière aveuglante. La chaleur devenait presque insupportable, et Ryven, déjà épuisé, sentait ses muscles se tendre douloureusement à chaque mouvement.
— Tu peux le faire, Ryven, murmura-t-il pour lui-même. Ce n’est qu’une colline.
Chaque mètre gravi semblait vouloir tester non seulement son endurance physique, mais aussi sa volonté. Sa respiration se faisait plus lourde, et ses doigts, éraflés par les rochers, commençaient à trembler.
À un moment, il glissa sur un caillou instable et tomba à genoux. Ses mains rencontrèrent la terre sèche, et il resta là quelques secondes, le souffle court, son cœur battant violemment dans sa poitrine.
— Non… Pas maintenant, pas ici…
Il serra les poings, ses ongles s’enfonçant dans ses paumes, et força son corps à se relever. Chaque fibre de son être criait pour qu’il abandonne, mais il continua, un pas après l’autre, ignorant la douleur et la fatigue.
Enfin, après ce qui lui sembla une éternité, il atteignit un plateau naturel. Il s’effondra sur le sol, son corps tremblant de fatigue. Pendant un instant, il resta allongé là, ses bras étendus et son souffle irrégulier.
Mais ce qu’il vit lorsqu’il ouvrit les yeux le força à se redresser rapidement.
En contrebas, un spectacle troublant s’offrait à lui.
Un troupeau de sangliers sanguinaires se déplaçait dans une clairière. Ces monstres, bien plus imposants que tout ce qu’il avait imaginé, fouillaient le sol avec leurs défenses massives, poussant des grognements sourds.
Leur apparence seule suffisait à glacer le sang de Ryven. Ces créatures mesuraient facilement quatre mètres de long, leurs muscles puissants roulant sous leur peau sombre. Leurs défenses, longues et recourbées, brillaient faiblement sous le soleil.
— Ils sont énormes… murmura-t-il, abasourdi.
Cependant, ce qui attira réellement son attention fut leur comportement. Contrairement à ce qu’il avait appris en cours, les sangliers semblaient presque organisés. Ils se déplaçaient en formation, partageant les ressources avec une coordination étrange.
Au centre du groupe, un spécimen bien plus grand que les autres dominait clairement. Son pelage noir luisait sous la lumière, et ses défenses, presque grotesques par leur taille, ajoutaient à son allure imposante.
— Leur boss…
Ryven détourna son regard vers la forêt en contrebas, où il avait déjà repéré les singes capés. Ces derniers continuaient de s’agiter bruyamment, mais ils semblaient éviter une zone spécifique, comme s’ils craignaient de s’y aventurer.
— Deux leaders… Deux territoires… une idée commençant à prendre forme dans son esprit.
Ryven se mit à genoux derrière un rocher, le souffle encore court mais son esprit de plus en plus alerte. Il savait qu’il ne pouvait pas affronter ces créatures directement. Son plan devait être aussi précis que risqué.
— Si je les pousse à se battre entre eux, je n’aurai pas à lever le petit doigt…
Il sortit lentement ses mains devant lui, respirant profondément pour calmer les tremblements qui les agitaient encore. Canaliser son mana était toujours difficile, mais il n’avait pas le choix. Une petite sphère de lumière apparut, vacillante mais assez brillante pour attirer l’attention.
Il fixa le troupeau de sangliers en contrebas.
— Très bien… Maintenant, réagissez.
Ryven lança la lumière au-dessus des sangliers. Les bêtes réagirent immédiatement, leurs grognements devenant plus profonds et plus menaçants. Le dominant noir leva la tête, ses yeux perçant cherchant la source de la perturbation.
Il poussa un cri guttural, et tout le troupeau se mit en mouvement, labourant le sol avec une fureur croissante. Ryven, caché dans l’ombre des rochers, regardait la scène avec une attention fébrile.
— Ça marche…
Une fois que les sangliers furent suffisamment éloignés, il descendit prudemment de son poste pour répéter l’opération du côté des singes capés.
Les singes, alertés par la lumière, réagirent de manière encore plus bruyante. Ils bondirent des branches, hurlant et se regroupant sous les ordres de leur chef, un spécimen marqué de rayures dorées qui semblait surveiller son territoire avec une vigilance extrême.
Ryven se recula lentement, se dissimulant dans les ombres. Les deux groupes, désormais excités et sur le qui-vive, se rapprochaient inexorablement.
— Maintenant, il suffit d’attendre…
Le chaos éclata presque instantanément. Les sangliers pénétrèrent dans la forêt avec une brutalité inouïe, détruisant tout sur leur passage. Les singes capés, galvanisés par les cris de leur chef, ripostèrent avec une férocité égale.
Ryven, recroquevillé derrière un arbre, observait la bataille avec des yeux écarquillés.
Les sangliers chargeaient sans relâche, leurs défenses éventrant les troncs d’arbres et projetant des éclats de bois dans toutes les directions. Leurs grognements gutturaux résonnaient comme des tambours de guerre, et leur masse écrasante faisait trembler le sol.
Les singes, bien que plus petits, utilisaient leur agilité pour bondir sur leurs adversaires. Ils lacéraient les flancs des sangliers avec leurs griffes acérées, se repliant dans les hauteurs avant de revenir à la charge.
Puis, au milieu de ce tumulte, les deux bosses apparurent.
Le dominant des sangliers, imposant et noir comme une ombre, poussa un rugissement qui fit taire momentanément les bruits de la bataille. Il se précipita vers le chef des singes avec une vitesse surprenante pour sa taille, ses défenses prêtes à frapper.
Le leader des singes, plus rapide, bondit gracieusement sur une branche avant de descendre en piqué, ses griffes étincelant à la lumière.
Le choc entre les deux créatures fut titanesque. Le sol trembla, projetant des débris dans toutes les directions. Ryven sentit son cœur s’arrêter un instant en voyant la puissance brute des deux monstres.
Les deux dominants s’affrontèrent avec une intensité presque surnaturelle. Le sanglier chargeait, détruisant tout sur son passage, tandis que le singe utilisait son agilité pour esquiver et frapper avec précision.
Ryven, toujours caché, murmura pour lui-même :
— Faites tout le travail…
Mais une pensée sombre l’envahit. Et si les deux créatures survivaient ? Que ferait-il alors ?
Il serra les poings, espérant que son plan tiendrait jusqu’au bout20Please respect copyright.PENANA5l8GVvDwQh