Quelques jours s’étaient écoulés depuis l’arrivée de Ryven sur ce terrain d’entraînement isolé. La vie semblait avoir pris une tournure répétitive : lever avec l’aube, une longue course éreintante, des heures d’entraînement musculaire, puis la méditation. Chaque soir, Ryven tombait sur son lit de fortune, épuisé au point de ne plus rêver.
Le terrain immense et vide commençait à lui devenir familier. Les rochers, les plaines désolées et le ciel éternellement dégagé formaient un paysage monotone, presque étouffant. Ryven sentait son corps s’adapter à l’effort physique, mais son esprit, lui, restait dans le doute. À quoi bon ? Il avait toujours été le plus faible de son académie. Comment cet entraînement allait-il changer cela ?
Son esprit dérivait souvent pendant ses courses. Chaque foulée, chaque respiration lourde devenait l’occasion de questionner sa place ici, et plus largement, dans ce monde où seuls les plus forts survivaient. Était-ce vraiment une chance ? Ou simplement une nouvelle voie vers l’échec ?
Mais ce jour-là, alors qu’il entamait son 30e tour du terrain, quelque chose brisa la monotonie. Une vibration subtile parcourut le sol, suivie d’un craquement sec. Ryven ralentit, ses yeux cherchant la source de ce bruit étrange. Le sol devant lui commença à se fissurer légèrement, une petite crevasse apparaissant en travers de son chemin. Surpris, il trébucha, manquant de tomber avant de se rattraper de justesse.
Il tourna la tête vers Caelmar, qui observait à distance avec son éternel sourire en coin. Pas un mot, pas un geste. Juste ce regard amusé, comme s’il attendait de voir comment Ryven allait réagir.
— Sérieusement ?! C’est censé être normal ici ? grogna Ryven en reprenant son équilibre.
Après avoir terminé ses 50 tours, complètement essoufflé, il s’approcha de Caelmar, qui l’attendait les bras croisés.
— Alors ? Comment tu trouves les surprises de ce terrain ? demanda l’éveillé de rang S avec un sourire provocateur.
Ryven essuya son front, ses vêtements collant à sa peau à cause de la sueur.
— Vous auriez pu prévenir, répondit-il avec un mélange d’agacement et de lassitude.
— Et gâcher l’apprentissage ? Ce terrain est imprévisible, tout comme les portails. Apprends à t’adapter, même lorsque le sol se dérobe sous tes pieds, déclara Caelmar avec une sérénité déconcertante.
Ryven leva les yeux au ciel, mais il ne put s’empêcher de réfléchir aux paroles de Caelmar. Peut-être que ce terrain n’était pas aussi vide qu’il le pensait.
Ryven, essoufflé par ses 50 tours de terrain, s’écroula sur le sol poussiéreux. La chaleur accablante, combinée à son effort physique, pesait sur tout son corps. Tandis qu’il reprenait son souffle, Caelmar s’approcha lentement, un sourire intrigué sur le visage.
— Alors, gamin, prêt pour la suite ? lança Caelmar en sortant un artefact de son sous-espace.
Ryven se redressa, les sourcils froncés. Ses jambes tremblaient encore sous l’effort précédent.
— La suite ? Je viens à peine de terminer ! Vous êtes sûr qu’on peut appeler ça un entraînement et pas une torture ? grogna Ryven.
Caelmar ignora sa plainte et activa l’artefact qu’il tenait dans sa main. Une lumière intense jaillit, et un groupe de cinq mannequins enchantés apparut devant eux. Ces créatures humanoïdes étaient d’un design à la fois élégant et intimidant : des corps articulés faits de bois sombre, renforcés par des plaques de métal, avec des runes gravées sur leur surface. Ces dernières luisaient faiblement, comme des veines chargées de mana.
Ryven recula d’un pas, méfiant.
— Qu’est-ce que c’est que ça ? demanda-t-il en pointant les mannequins du doigt.
Caelmar croisa les bras et observa Ryven d’un air amusé.
— Des mannequins d’entraînement. Ils sont spécialement conçus pour évaluer et améliorer les compétences physiques et magiques des éveillés.
Ryven fronça les sourcils. Il n’était pas sûr de vouloir découvrir comment ces "mannequins" allaient améliorer quoi que ce soit.
— Et ils viennent d’où, ces trucs ? C’est vous qui les avez fabriqués ?
Caelmar éclata de rire.
— Moi ? Non, non. Je laisse ça aux génies. Ces mannequins ont été créés par l’un des meilleurs artisans du continent d’Eryndor. Il travaille avec des éveillés de haut rang et ne fabrique que des pièces d’exception. Peut-être que tu le rencontreras un jour… si tu survis jusqu’à là, bien sûr.
— Génial, encore une pression supplémentaire, marmonna Ryven en roulant des yeux.
Les mannequins s’animèrent soudainement, leurs runes s’illuminant d’une lumière vive. Ils se déplacèrent avec une fluidité inquiétante, presque humaine, et levèrent leurs bras en direction de Ryven. De petites boules d’énergie lumineuse se formèrent dans leurs mains avant d’être projetées à toute vitesse.
— Ton objectif est simple, expliqua Caelmar d’une voix calme. Esquive leurs attaques, puis touche-les avec ta magie de lumière. Facile, non ?
Avant que Ryven ne puisse répondre, les projectiles commencèrent à pleuvoir autour de lui. Il se jeta au sol pour éviter le premier tir, puis roula sur le côté pour esquiver le suivant. Les mannequins ne lui laissaient aucun répit.
— Vous appelez ça "facile" ?! cria Ryven, sa voix à moitié couverte par le bruit des explosions mineures.
Les mannequins continuaient leur assaut implacable. Ryven tenta de riposter en créant une petite sphère de lumière dans sa main, mais sa magie vacillante disparut avant même qu’il ne puisse la lancer.
— Concentre-toi, Ryven ! Ne gaspille pas ton énergie inutilement ! cria Caelmar depuis son point d’observation.
Sous la pression, Ryven sentit une énergie différente monter en lui. Sa frustration et son instinct de survie activèrent involontairement son mana d’ombre. Une lame noire et fine se forma brièvement dans sa main. Dans un mouvement désespéré, il la lança en direction d’un mannequin. La lame trancha l’automate en deux, coupant net son attaque.
Les autres mannequins s’immobilisèrent, leurs runes s’éteignant comme si quelqu’un avait coupé leur connexion magique. Ryven resta figé, ses yeux fixant ses mains tremblantes.
— Qu’est-ce que c’était… murmura-t-il, horrifié.
Caelmar s’approcha lentement, un sourire satisfait sur le visage.
— Bien, très bien, déclara-t-il. Il semble que tu commences à comprendre.
Ryven leva des yeux paniqués vers lui.
— Je ne voulais pas… C’était un accident ! Ce pouvoir, je ne le contrôle même pas…
Caelmar posa une main ferme sur son épaule.
— Peu importe que tu l’aies voulu ou non. Cette énergie est en toi. Tu peux choisir de l’ignorer et de la laisser te détruire… ou tu peux l’affronter et la maîtriser.
Ryven détourna le regard, ses pensées un chaos d’émotions contradictoires. Il savait que Caelmar avait raison, mais l’idée de manipuler cette énergie sombre le terrifiait.
La nuit était tombée, apportant un semblant de fraîcheur après la chaleur accablante de la journée. Ryven, assis en tailleur près de son campement, tentait de méditer comme Caelmar le lui avait enseigné. Sa tâche était simple : se concentrer sur son noyau principal pour en améliorer la stabilité. Mais rien n’était simple lorsqu’il s’agissait de Ryven.
Dès qu’il fermait les yeux, il sentait la présence perturbante de son second noyau. Cette source d’énergie sombre semblait coexister harmonieusement avec son noyau principal, mais leur interaction créait une tension constante qui rendait la méditation presque impossible.
Il inspira profondément, essayant de se concentrer uniquement sur la lumière douce et apaisante de son premier noyau. Mais plus il essayait de l’ignorer, plus la présence de l’autre noyau se faisait sentir. C’était comme une ombre tapie dans un coin de son esprit, refusant d’être ignorée.
Puis, soudain, une voix résonna dans sa tête. Les mots étaient indistincts, déformés, comme s’ils étaient prononcés dans une langue ancienne ou étrangère.
"イひ 乇 レ乇 アの尺イ乇ひ尺 りレム レひノ尺乇 り丂 ム乃リ丂"
Ryven ouvrit brusquement les yeux, son souffle s’accélérant. Son cœur battait à tout rompre, et une sueur froide perlait sur son front. Pendant une fraction de seconde, une vision s’imposa à lui : un champ de bataille infini, des portails béants crachant des ombres gigantesques, et une silhouette indistincte qui semblait l’observer de loin.
— Ryven ! appela Caelmar, alarmé par l’agitation soudaine de son élève.
Ryven tourna lentement la tête vers lui, son visage blême.
— J’ai entendu une voix, balbutia-t-il. Et j’ai vu… quelque chose. Des ombres, des portails… et quelqu’un.
Caelmar fronça les sourcils, s’asseyant en face de Ryven.
— Ces visions ne sont pas un hasard, déclara-t-il. Elles pourraient être la clé pour comprendre ton affinité unique.
Ryven secoua la tête, son regard perdu.
— Mais comment suis-je censé comprendre quelque chose d’aussi confus ?
Caelmar posa une main rassurante sur son épaule.
— Une étape à la fois, Ryven. Chaque moment d’entraînement t’en rapprochera. Mais pour l’instant, repose-toi. Tu as déjà beaucoup affronté aujourd’hui.
Allongé sous le ciel étoilé, Ryven fixait les constellations, cherchant du réconfort dans leur immobilité. Son corps était exténué, mais son esprit était plus agité que jamais.
"Qu’est-ce que je suis censé devenir ?"
Il ferma les yeux, se promettant de ne pas laisser cette énergie obscure le dominer. Peu importe à quel point le chemin serait difficile, il continuerait.
La nuit était silencieuse, mais elle semblait porter en elle la promesse de nouveaux défis14Please respect copyright.PENANAUYAzyitFyj